Partie 27 : Ils sont arrivés à une maison de pain d'épice fine
Enfant, je n'arrivais pas à m'imaginer une pâtisserie sucrée sous le nom de "Pfefferkuchen" et je supposais que la sorcière, par méchanceté, avait mis du poivre dans le gâteau. Un jour, j'ai appris que ce "gâteau au poivre" n'était pas différent du "pain d'épices".
Le pain d'épices français et le gingerbread anglais font également partie de cette catégorie de pâtisseries. Il existe donc d'innombrables recettes différentes pour ces gâteaux sucrés aux épices.
Il est intéressant de noter que la cannelle est souvent présente en assez grande quantité dans les recettes allemandes, alors qu'elle est presque ou totalement absente des recettes d'Europe de l'Est ou du Nord. Inversement, le poivre ne figure que dans le nom du Pfefferkuchen allemand et n'est pas ajouté comme épice, contrairement à l'Europe de l'Est où il est effectivement utilisé pour la pâtisserie.
Je survole sur doazmol-rezepte.ch quelques recettes suisses de pain d'épices tirées de livres de cuisine des années 1901 à 1932 ; aucune des recettes qui y figurent ne contient de poivre. Le poivre semble également étranger aux pains d'épices lucernois, argoviens et bâlois, et de manière très spartiate, au pain d'épices bernois aux noisettes, qui n'est assaisonné que de cannelle.
Les premières traces écrites de petits gâteaux épicés au miel remontent à 350 av. J.-C., mais les découvertes archéologiques dans les tombes égyptiennes montrent qu'ils connaissaient déjà les pâtisseries sucrées au miel. Les Romains connaissaient également le panis mellitus, un pain gratiné au miel. Cette tradition s'est poursuivie avec certaines innovations dans les monastères du Moyen Âge. Sous le nom de "Pfefferkuchen", cette pâtisserie est mentionnée dès 1296 à Ulm. Au 14e siècle, c'est surtout le pain d'épices de Nuremberg qui est très connu. Il trouve son origine dans le monastère de Heilsbronn. Comme le pain d'épices était souvent cuit dans des monastères où l'on fabriquait également des hosties, il était parfois cuit sur des gaufrettes. En raison de sa longue durée de conservation, il pouvait être stocké et distribué par les moines en période de pénurie alimentaire. Y aurait-il ici un lien entre le conte de Hansel et Gretel et l'utilisation du pain d'épices comme nourriture de secours ? Dans la version originale des frères Grimm, ce n'est pas la méchante marâtre mais la mère biologique de Hansel et Gretel qui envoie ses enfants dans la forêt, non par méchanceté mais par faim. L'accent de la tragédie n'est donc pas mis sur le caractère de la mère mais sur la misère, la pauvreté. Du point de vue de l'histoire de la langue, "Leb" dans le mot Lebkuchen signifie "miche", c'est-à-dire pain azyme, mais c'est probablement en raison de son effet salvateur que le nom a été interprété en étymologie populaire comme un gâteau de vie.
Le pain au poivre ou pain d'épices est un biscuit aux épices mais, curieusement, on n'utilise presque pas de poivre dans sa fabrication... Peut-être que le poivre, "roi des épices", était synonyme d'épice ?